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vices et de ses vertus. Thiers et Mignet, qui assistaient à ses derniers moments avec moi, firent paraître, malgré les chicanes de la censure, des articles[1] où leur fidèle attachement appela les regrets de la France sur le cercueil de notre éloquent ami. Son convoi, parti du château de Maisons, où Mannel avait passé ses derniers jours, fut conduit par M. Laffitte, le général La Fayette, et grand nombre d’autres députés. Il fut surtout digne de sa mémoire par l’immense concours de peuple qui se pressa sur les boulevards extérieurs, que nous avions à parcourir, l’entrée de Paris nous ayant été interdite par ordre supérieur. Ici se fait sentir la différence que le gouvernement faisait de Manuel et du général Foy[2], dont le convoi, dans l’intérieur de Paris, n’avait rencontré aucun obstacle, même lorsque la jeunesse des écoles traîna le corbillard. Le peuple ayant voulu rendre le même honneur au tribun expulsé, accourut une armée de gendarmes prêts à nous sabrer, si cet élan n’était à l’instant réprimé. Le peuple s’obstinait ; pour éviter un massacre, il fallut

  1. M. Mignet publia aussi, avec la collaboration de Béranger, une brochure que le parquet fit saisir et poursuivre. Mais, assisté par La Fayette, M. Mignet fut acquitté le 28 septembre. (Voir les Mémoires de La Fayette, tome VI, page 248, voir aussi la Correspondance de Béranger, tome I, page 299.)
  2. Maximilien-Sébastien Foy, né à Ham, le 3 février 1775, est mort d’une maladie de cœur, le 28 novembre 1825.