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presse et dont néanmoins l’auteur poursuivi se garda bien de tirer vanité. Mais, si le souffle qui gonflait et emportait son frêle ballon n’était pas celui de la gloire, il était au moins celui d’une opinion généreuse et patriotique, et il put s’en montrer fier.

En 1825[1], je cédai un troisième volume au libraire Ladvocat. M. de Villèle gouvernait, et je calculai que cet homme d’État avait trop de tact et d’esprit pour me susciter un nouveau procès. Le penserait-on ? je me crus engagé par là à me montrer moins hostile. Le libraire et l’imprimeur furent pourtant tiraillés par la police pour obtenir de moi quelques retranchements. J’en fis dans leur intérêt qui me parurent sans importance, mais je résistai à de longues et nombreuses sollicitations pour me faire ôter le Couplet d’envoi à Manuel, qui termine les Esclaves gaulois. Quel parti prit le libraire Ladvocat ? On tira quatre à cinq mille exemplaires sans le couplet et sans quelques autres passages que la police avait fait disparaître à mon insu et on laissa le reste de l’édition comme je l’avais exigé[2]. Ayant été instruit de cette falsification le jour même où Ladvocat donnait un grand dîner pour célébrer l’apparition du volume, je refusai de m’y rendre, malgré

  1. Au mois de mars.
  2. Voir dans la Correspondance une lettre du 9 avril 1825. À cette date l’édition était déjà épuisée.