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ne pouvait me faire peur. J’avais à Sainte-Pélagie une chambre chaude, saine et suffisamment meublée, tandis que je sortais du gîte dégarni de meubles, exposé à tous les inconvénients du froid et du dégel, sans poêle ni cheminée, où, à plus de quarante ans, je n’avais en hiver que de l’eau glacée pour tous les usages et une vieille couverture dont je m’affublais lorsque, dans les longues nuits, me prenait l’envie de griffonner quelques rimes. Certes, je devais me trouver bien mieux à Sainte-Pélagie. Aussi je m’écriais quelquefois : « La prison va me gâter. » À ceux qui, pensant à l’emploi de deux mille francs, s’étonneraient de la pauvreté de mon logement de ville, je répondrai par mon axiome favori : « Quand on n’est pas égoïste, il faut être économe. »

Pendant ma détention, le parquet m’intenta une nouvelle affaire, suscitée par M. Bellart, procureur général. L’ingrat ! dans les Cent-Jours, j’avais été prié de faire des démarches auprès de M. Régnaud de Saint-Jean-d’Angely, pour qu’il voulût bien s’assurer des intentions de l’Empereur à l’égard de M. Bellart, l’un des plus ardents provocateurs[1] de

  1. Comme membre du conseil général de la Seine et rédacteur d’une adresse. Nicolas-François Bellart, né à Paris, le 20 novembre 1761, est mort le 7 juillet 1826. On a recueilli (1827-28, six volumes in-8o) ses Œuvres complètes. Sa première procédure après la chute de l’Empire fut l’acte d’accusation du maréchal Ney.