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de ne pas faire imprimer ou de retirer son nom de la liste des souscripteurs. Rien ne m’arrêta ; au contraire, j’en fus plus convaincu de la nécessité de ce coup de feu d’une sentinelle avancée pour réveiller le camp libéral, si étrangement commandé par ceux qui avaient l’honneur de passer pour ses chefs les plus vigoureux. Manuel pensait comme moi, et, grâce à mon ami M. Bérard et à quelques autres fidèles, mes deux in-douze, imprimés non sans quelques difficultés chez M. Firmin Didot, parurent en octobre, tirés à dix mille cinq cents exemplaires[1].

La publication se faisait à mon compte ; je fus donc forcé d’être à la tête du débit, pour lequel mon vieil ami Béjot me fut si utile. Je pus voir, d’heure en heure, la rapidité de la vente dépasser toute prévision. J’avais contracté, pour frais d’impression, quinze mille francs de dettes, et je n’osais plus compter sur l’exactitude des souscripteurs. Aussi éprouvai-je une folle joie, lorsque je fus en possession de ces énormes quinze mille francs, qui m’épouvantaient et que je me figurais ne pouvoir retirer de mes petits livres. En comparaison de ces quinze

  1. Je dois dire ici que Sébastiani et Casimir Périer furent de ceux qui ne me retirèrent pas leur appui dans cette circonstance. Bien que je ne fusse pas intimement lié avec le dernier, je l’ai toujours trouvé excellent pour moi. Si je m’érigeais en homme politique, j’aurais mieux à dire sur son ministère, auquel on ne me paraît pas encore avoir rendu suffisante justice. (Note de Béranger.)