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monté la tête. Je ne suis donc pas si coupable. Mais que penser de ces Bourbons qui attachaient de l’importance à l’opinion d’une fille aussi décousue que moi ! » La crédulité du mot ajoute à sa portée.

En 1816, au mois de janvier, Arnault, banni, quitta la France, et nous le conduisîmes jusqu’au Bourget[1], qui était pour ainsi dire alors la limite du royaume ; le reste étant, de ce côté-là, placé sous l’occupation étrangère. Le soir, dans une chambre d’auberge, à table avec un jeune officier de gendarmerie chargé de veiller sur cette frontière, et qui déplorait les malheurs de la patrie, je chantai au pauvre proscrit la chansons des Oiseaux, tristes adieux, suivis d’adieux plus tristes encore. Cette chanson fut sur le point de me faire perdre la petite place que je devais à Arnault. La sienne fut donnée à M. Petitot, homme de lettres[2], devenu dévot et légitimiste ; mais

  1. À une lieue de Paris, au delà de la Villette, sur la route de Flandre.
  2. Petitot (Claude-Bernard) né à Dijon le 30 mars 1772, et mort le 6 avril 1825, avait de bonne heure donné tout son temps à l’étude des lettres. Quand Fontanes fut proscrit, au 18 fructidor, il lui prêta asile, et c’est en reconnaissance de ce service que Fontanes, devenu grand maître de l’Université, le nomma inspecteur général des études. En 1814, il était devenu secrétaire général de l’Université à la place d’Arnault. On lui doit, entre autres ouvrages, le répertoire du Théâtre-Français (1803-1814) en vingt-trois volumes in-8o, avec des suppléments, et la belle collection des Mémoires pour servir à l’histoire de France, qu’il conduisit, aidé par son frère et par M. Montmerqué, jusqu’au quarante-quatrième volume.