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jeunes talents, nés peut-être pour un avenir de gloire, et qui d’ailleurs effrayait ma plume paresseuse et ma conscience timorée. Pour m’adonner à une pareille profession, il eût fallu renoncer à mes belles espérances poétiques, à mes rêves : c’eût été rendre ma mansarde bien solitaire.

Le Génie du Christianisme, malgré les critiques que ce livre provoqua dans le monde philosophique, et quelle que fût la forme adoptée par l’auteur, me remplit d’enthousiasme. Chateaubriand révélait les

    agréable aux lecteurs, et permettent à celui qui les possède de parler cent fois de la même chose en paraissant toujours nouveau. J’aurais tout cela moins que Geoffroy ; bien d’autres qualités moins encore, et je n’aurais de plus que lui qu’un amour de justice qui ferait des ennemis au rédacteur et pas un abonné au journal.

    « Pardonnez-moi cette longue lettre : je ne voulais que vous écrire un mot, et j’ai été entraîné par mon sujet. Je reviens à ce que je voulais vous dire d’abord : c’est qu’il m’est impossible de n’être pas pénétré de reconnaissance pour l’amitié que vous me montrez dans cette circonstance, car je reste persuadé que je vous ai toute obligation de cette démarche. Ce n’est pas la première preuve d’intérêt que je reçois de vous ; ne trouvez point, je vous prie, que j’y réponds mal. Ayez la bonté de peser mes raisons, de consulter un peu mon caractère, et vous verrez que ma reconnaissance doit rester d’autant plus entière que je n’aurai point accepté une fortune qui serait suivie de trop d’inconvénients.

    « Encore une fois pardonnez à cette longue lettre : c’est la seule fois que je ferai le Duviquet.

    « Tout à vous de cœur pour la vie.

    Béranger.

    « P. S. Voici le Marquis de Carabas. Faire des chansons, voilà mon métier ; c’est fâcheux qu’il soit peu lucratif. » (Correspondance, tome I, p. 205.)