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gique, ami de Lucien Bonaparte et chef de la division de l’instruction publique au ministère de

    Bonaparte. Il connut différents essais de ma faible muse, entre autres, un poëme du Déluge et du Rétablissement du Culte. Il daigna m’en témoigner sa satisfaction, me dit les avoir lus à différents littérateurs distingués (dont sans doute, monsieur, vous faisiez partie), m’engagea à beaucoup travailler, et comme je n’ai personne pour diriger ma jeunesse, me promit des conseils que dès lors ses voyages l’empêchèrent de me donner. À son retour à Paris, il y a six mois, je lui remis un poëme de la Mort de Néron, dont je lui devais le sujet. Il me donna des marques de son contentement, m’engagea de nouveau à lui faire parvenir mes ouvrages, et, par malheur, s’éloigna encore, sans qu’on puisse prévoir le moment de son retour. Les avis qu’il m’avait promis, les connaissances qu’il devait me faire faire, tout m’a manqué.

    « Voilà les détails qui, j’espère, monsieur, fourniront une excuse à mon importunité. Je viens maintenant au motif de ma lettre.

    « J’ai besoin d’avoir un guide éclairé, avant de me lancer dans la carrière des lettres. Vous êtes intimement lié avec M. Lucien Bonaparte ; j’ose vous prier de m’en servir. À cet effet, je joins à la présente le petit poëme de Néron, et une ode que j’ai envoyée, il y a quelques mois, à celui pour qui j’ai conçu la plus vive reconnaissance. Soit par écrit, soit en m’accordant quelques instants, ce qui me serait infiniment agréable, indiquez-moi, de grâce, monsieur, les corrections à faire à ces deux morceaux. Permettez-moi aussi de vous en présenter d’autres ; enfin, soyez pour ma faiblesse un appui aussi constant qu’il est nécessaire.

    « Je ne dirai rien de plus, monsieur ; pour réussir auprès de M. Lucien Bonaparte, j’ai dédaigné la voie de l’adulation, et je pense même que mes manières franches m’ont mieux servi que tout autre moyen ; je dois en agir de même avec vous, monsieur : de quoi me serviraient d’ailleurs les éloges que je pourrais donner à l’auteur de Marius ? Lorsque la voix du public s’est fait entendre en pareil cas, celle des particuliers ne peut que paraître bien faible et même bien ennuyeuse.

    « J’espère, monsieur, que vous daignerez me faire une réponse