DEUXIÈME CORSE.
La mère, dame sage et bonne,
Sur son lit, le front incliné,
Par le jour où son fils est né,
Le recommande à sa madone.
PREMIER CORSE.
Les chants français troublent ville et faubourgs.
DEUXIÈME CORSE.
D’exploits futurs ces chants parlent toujours.
PREMIER CORSE.
Pourtant les Corses sont des braves.
Rome, la Rome des Césars,
N’osait en prendre pour esclaves :
Nous avions déjà des poignards.
DEUXIÈME CORSE.
On lui donne un patron sans gloire :
C’est Napoléon, m’a-t-on dit ;
Mais, si le saint est sans crédit,
Le nom semble fait pour l’histoire.
PREMIER CORSE.
Chaque navire a pavoisé son bord.
DEUXIÈME CORSE.
Les Anglais seuls désertent notre port.
PREMIER CORSE.
En quoi l’âpre sol de cette île
Peut-il tenter un roi puissant ?
Nos mains, sans le rendre fertile,
L’ont inondé de bien du sang.
DEUXIÈME CORSE.
Un carillon de bon augure
Reconduit l’enfant au logis.
Loin du sein, hélas ! tu vagis,
Pauvre petite créature !
PREMIER CORSE.
Que vois-je au loin sur nos rochers déserts ?
DEUXIÈME CORSE.
Un jeune aiglon qui plane dans les airs.
PREMIER CORSE.
Quand l’ombre du manteau d’un maître
Passe entre le soleil et nous,
Qu’importe un enfant qui peut-être
Doit traîner sa vie à genoux ?
DEUXIÈME CORSE.
Ami, Dieu seul renverse et fonde.
Ne peut-il, lui qui la défend,
Donner à la France un enfant,
À cet enfant donner le monde ?
PREMIER CORSE.
Quel bruit soudain se mêle aux cris joyeux ?
DEUXIÈME CORSE.
C’est le tonnerre : il ébranle les cieux !