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ses préceptes invariables. La morale religieuse est celle qui est en harmonie avec l’idée d’un Dieu rémunérateur et juge suprême, avec des craintes et des espérances d’un ordre surnaturel, c’est-à-dire avec le dogme sacré des récompenses et des peines. Le défenseur lui-même adopte cette définition ; il pense que la morale religieuse a pour fondement la croyance d’un être éternel appréciateur de nos actions. Eh bien ! quelle idée a-t-il donnée de cet être incommensurable et sublime ? Eh quoi ! les païens eux-mêmes savaient revêtir leurs faux dieux des plus magnifiques attributs ; Platon appelle Jupiter le plus grand architecte du monde ; Homère dit que ce Dieu ébranlait l’univers du seul mouvement de ses sourcils ; et c’est parmi nous que le Dieu des chrétiens, qui d’une parole créa la lumière, qui mesura la mer dans sa main, pesa les montagnes, et de son souffle vivifiant fit éclore tout ce qui pare la nature ; c’est parmi nous que ce Dieu est représenté comme un être machinal et stupide, qui met le nez à sa fenêtre en s’éveillant, et déclare qu’il est étranger à tout ce qui se passe ici-bas, que chacun peut y vivre à son gré sans redouter ses jugements !

« On vous a dit, sur le chef des offenses commises envers la personne du roi, qu’il devait les pardonner. Eh ! que n’a-t-il pas pardonné en effet ! Mais est-ce donc à nous à faire les honneurs de son inépuisable clémence ? Est-ce à nous, chargés de faire exécuter une loi qui punit les offenses dont il s’agit, d’usurper le droit de grâce qui est le plus bel apanage de la royauté ?

« On prétend que l’auteur a voulu seulement attaquer les ministres et non le roi ; mais nous ne pensons pas qu’on puisse appliquer aux ministres les vers où le sieur de Béranger parle de ces nains