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Voici quelques vers de son épilogue. On ne peut, certes, leur refuser l’expression juste et poétique. La pensée de regret que Béranger y laisse percer est naïve et touchante. Un poète qui, à vingt-deux ans, éprouve une telle défiance de soi-même et qui l’exprime avec autant de bonheur, ne doit pas désespérer de l’avenir.


Pourquoi faut-il, dans un siècle de gloire,
Mes vers et moi, que nous mourions obscurs !
Jamais, hélas ! d’une noble harmonie
L’antiquité ne m’apprit les secrets.
L’instruction, nourrice du génie,
De son lait pur ne m’abreuva jamais.
Que demander à qui n’eut point de maître ?
Du malheur seul les leçons m’ont formé,
Et ces épis que mon printemps vit naître
Sont ceux d’un champ où ne fut rien semé.


Plus loin, s’adressant à M. Lucien Bonaparte, qui était alors en exil à Rome, l’auteur terminait ainsi :


Vous qui vivez dans le séjour antique
Où triomphaient les rois de l’univers ;
Que reste-t-il de leur pompe héroïque ?
De vains débris et des tombeaux déserts.
Là, pour les grands quelle leçon profonde !
Ah ! puissiez-vous, attentif à ma voix,
Plein des vertus que le calme féconde,
Aimer les champs, la retraite et les bois !
Oui, fier du sort dont vous avez fait choix,
Restez, restez, malgré les vœux du monde,
Libre de l’or qui pèse au front des rois.


Un académicien-poète, à qui Béranger, encore inconnu, parlait un jour de ses Idylles et du soin qu’il y