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Aujourd’hui, l’hymne de la joie expire sur nos lèvres.

Le peuple juif, captif à Babylone, assis en larmes au bord de l’Euphrate, regardait couler les eaux du fleuve. Ses harpes muettes pendaient aux saules du rivage. Qui aurait eu le courage de chanter le cantique de Jéhovah, sur un sol étranger ? « Terre patriarcale de Jérusalem, s’écriait le Psalmiste, si jamais je t’oublie, que ma main droite se dessèche ! Que ma langue reste collée à mon palais si je cesse de penser à toi ; si tu n’es plus la première de mes joies ! »

Le psaume s’achève en paroles imprécatoires. Nous nous interdisons de les reproduire ; nous ne sommes plus du Testament Ancien, qui tolérait la loi du talion : « Œil pour œil, dent pour dent. » Nos lèvres, purifiées par le feu de la charité chrétienne, ne profèrent point de haine.

Haïr, c’est prendre le mal d’autrui pour but et s’y complaire. Quelles que soient nos douleurs, nous ne voulons point de haine à ceux qui nous les infligent. La concorde nationale s’allie, chez nous, à la fraternité universelle. Mais au-dessus du sentiment de l’universelle fraternité, nous plaçons le respect du droit absolu, sans lequel il n’y a pas de commerce possible, ni entre les individus, ni entre les nations.

Et voilà pourquoi, avec saint Thomas d’Aquin, le docteur le plus autorisé de la théologie chrétienne, nous proclamons que la vindicte publique est une vertu.

Le crime, violation de la justice, attentat à la paix publique, qu’il émane d’un particulier ou d’une collectivité, doit être réprimé. Les consciences sont soulevées, inquiètes, à la torture, tant que le coupable