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MILLE ET UN JOURS

de cet enfer, j’avais le regret d’y laisser plusieurs de ceux avec qui j’avais partagé les ennuis et les privations de la captivité, aux mains de leurs geôliers, privés de liberté, privés de l’atmosphère bienfaisante de la patrie absente.

Le train devait partir à 9 heures, et le départ de la prison même était fixé à 8 heures. À ce moment donc, je me séparai de ces braves garçons, à la porte même de la prison. Nous étions tous sous le coup d’une profonde émotion.

Le train pour la Hollande partait de la gare dite de Silésie. De la prison à cette gare, j’étais accompagné par trois militaires allemands : l’ordonnance, un sous-officier et l’officier qui devait m’accompagner jusqu’à la frontière.

Arrivé à la gare, l’officier me fit part de son intention de réclamer des autorités la jouissance exclusive, par nous, de tout un compartiment. Nous devions passer toute la nuit dans ce train. L’officier eut une entrevue avec le chef de gare, et lorsque le train stoppa, un Monsieur en uniforme bleu, — ce devait être ce chef de gare, — était à nos côtés et s’empressait de mettre à notre disposition un compartiment complet.

L’officier avait dû invoquer, pour obtenir ce privilège, une raison d’État : le transport d’un prisonnier de nationalité anglaise en territoire allemand pouvait motiver cette mesure de précaution extraordinaire ; les conversations que ce prisonnier anglais entendrait sur le train seraient peut-être compromet-