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MILLE ET UN JOURS

téléphonée, il y a un instant, de la Kommandantur, et j’ai reçu instruction de vous en faire part. »

Je n’ai pu m’empêcher de saisir la main de ce sous-officier pour le remercier de la bonne nouvelle qu’il m’apportait. Ma porte n’était pas encore refermée que j’étais monté sur une chaise, appelant de ma fenêtre ceux de mes compagnons de captivité avec lesquels j’étais quotidiennement en relations. Je leur annonçai la bonne nouvelle : je reçois de nombreuses félicitations, et tous semblent heureux de ce qui m’arrive. Le lendemain est grand jour de fête ; tous les Anglais partagent ma joie ; l’on décide de faire une réunion plénière à ma cellule, et même d’y organiser un déjeuner. C’était en 1916. À cette époque, toutes les victuailles étaient rationnées à Berlin, et nous étions soumis au régime de la prison, c’est-à-dire qu’il nous était absolument défendu de faire venir quoi que ce soit du dehors. Préparer un déjeuner convenable, dans de telles circonstances, n’était pas un problème de mince envergure.

Des invitations, cependant, avaient été lancées : tous les Anglais avaient été priés d’assister à un déjeuner qui aurait lieu le soir au salon (!) No 669, dans l’Hôtel International de la Stadtvogtei, pour rencontrer M. Béland à l’occasion de son prochain départ pour l’Angleterre. Ces cartes d’invitation portaient en post-scriptum : — « On est prié d’apporter son assiette, son couteau, sa fourchette, sa tasse à thé, son verre et son pain ; quant au sel, on le trouvera sur les lieux. »