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ou rouge s’enlevant sur d’étincelantes mosaïques qu’entourent de riches et larges bordures à feuillages. Les armatures de fer, forgées suivant le contour des médaillons, forment comme le squelette du vitrail et contribuent, par leurs silhouettes noires, à donner de la fermeté à la composition, qui, à distance, n’est jamais confuse. Aux fenêtres supérieures de la grande nef, des transepts et de l’abside, sont réservées les hautes figures en pied qui souvent, comme à Bourges, à Chartres et à Lyon, atteignent des proportions colossales.

L’un des principaux mérites des vitraux de cette brillante époque est de se rattacher avec une parfaite harmonie à l’édifice qu’ils décorent. Le verrier ne cherche pas à faire une œuvre individuelle, destinée à être examinée isolément ; son but est de concourir, sous la direction unique du maître de l’œuvre, ainsi que tous les artistes appartenant à d’autres corps d’état, à l’ornementation du monument. Non seulement, par une judicieuse et harmonieuse distribution des couleurs, il illumine l’intérieur de la cathédrale d’un jour à la fois mystérieux et splendide qui ajoute à la sévérité grandiose de l’architecture, mais encore il aspire, comme l’imagier, à présenter l’enseignement des vérités fondamentales de la religion, les récits de la Bible, les vies des saints et, parfois, il exprime des idées théologiques plus savantes et plus compliquées que celles que développent les sculptures des façades. Le vitrail de la Rédemption, à Saint-Jean de Lyon, nous en fournira un exemple.

La quantité prodigieuse des verrières des treizième et quatorzième siècles qui décorent les cathédrales et bon nombre d’églises rurales pourrait faire croire qu’elles étaient exécutées à bas prix. Mais si bas que fût alors le taux moyen des salaires, le travail matériel était toujours considérable : il n’est pas rare, en effet, de compter, dans un panneau d’un mètre superficiel, jusqu’à cinq ou six cents morceaux de verres coupés minutieusement au fer rouge et à l’égrugeoir. Le montage dans les plombs non laminés, comme de nos jours, mais fondus ou péniblement poussés au rabot, représentait une énorme dépense de temps.

Ce n’était donc pas trop des ressources des corps de métiers pour l’offrande d’un vitrail, comme à Bourges, à Chartres, à Auxerre et en nombre d’autres églises. Les princes, les chanoines, les évêques donnaient à leur cathédrale une verrière, une rose et s’y faisaient représenter à genoux, comme on le voit à Saint-Jean, par exemple. L’archevêque Renaud de Forez est figuré dans une des fenêtres de l’abside, et le doyen du chapitre, Arnould de Colonges, dans la rosace du transept nord (fig. 4). Tous deux tiennent dans leurs mains la représentation du vitrail qu’ils ont offert.