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brillant & leur beauté : on en eſt privé par l’éclat du Cornet, qui les abſorbe & les émouſſe. D’autres font encore pis ; ils y joignent le Tremblant-fort. Ceux qui ont le plus de goût ſont bien plus attentifs à tirer de leur Inſtrument toute l’harmonie dont il eſt ſuſceptible ; auſſi ils ne tombent point dans ces inconvénients, qui marquent peu de diſcernement.

On peut encore toucher quelquefois une Fugue grave ſur le mêlange ſuivant, qui eſt fort harmonieux : on mettra tous les fonds au grand Orgue ; & au Poſitif, on mettra le Cromorne avec le Preſtant ſeulement ; les Claviers ſeront enſemble.

Ce mêlange eſt propre à toucher auſſi un caprice rempli d’accords dans les baſſes, en batteries modérées ſi l’on veut, & faire chanter les deſſus en une ou deux parties.

V.

Pour la Fugue de mouvement.

On la touche ordinairement ſur le Grand Jeu : on peut encore l’exécuter ſur tout le grand Jeu de Tierce, joint avec celui du Poſitif, les Claviers enſemble. Quelques Organiſtes y ajoutent le Clairon au grand Orgue ; d’autres le Cromorne au Poſitif ; mais ce mêlange eſt alors irrégulier, attendu qu’un Jeu d’Anche ne peut parler dans ſa véritable harmonie, & dans ſon accord avec tout le Jeu de Tierce.

VI.

Pour la Tierce en Taille.

On mettra au grand Orgue pour l’accompagnement les deux 8 pieds, ou trois s’il y en a : au Poſitif, les deux 8 pieds, le Preſtant, (ou encore mieux, la Flûte de 4 pieds, s’il y en a, au lieu du Preſtant ;) le Naſard, la Quarte, (ou au défaut de la Quarte, la Doublette) la Tierce & le Larigot. On mettra à la Pédale pour faire la Baſſe, tous les Jeux de fond de la Pédale, comme les 16 pieds, s’il y en a, les 8 pieds & les 4 pieds.

Il y a beaucoup d’Organiſtes qui font l’accompagnement trop près du Récit en Taille : il ne fait alors preſqu’aucun effet, il ſe confond avec le Récit. On doit le faire toujours le plus haut que l’on peut, par exemple, ſur la quatrieme octave ; l’accompagnement alors ſort bien, & orne mieux le Récit : il eſt d’ailleurs plus brillant, & imite mieux la Flûte Allemande.

Le Récit qu’on joue ſur les tailles dans cette maniere de toucher, doit être bien chantant & orné avec beaucoup de goût. Il y a des Organiſtes qui ne font que des roulades d’un bout de Clavier à l’autre, beaucoup de rapidités, de paſſages & de cadences, le tout ſans preſqu’aucun chant : ce n’eſt pas-là un véritable Récit ; il faut eſſentiellement du chant pour la mélodie.