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INTRODUCTION
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de la vraie noblesse n’ont pas une source plus pure et surtout plus chrétienne.

Bien plus, sous une forme simplement héraldique, notre ouvrage ne laisse pas que de donner des aperçus sur l’admirable mouvement religieux du XIXe siècle, et même sur certains côtés de son histoire ecclésiastique. On verra que Pie VII refusa de préconiser des prêtres nommés évêques par Napoléon (v. g, l’abbé Saint-Médard), ou des évêques nommés archevêques, comme Mgr d’Osmond, qui prit possession temporelle de son siège de Florence et redescendit évêque de Nancy en 1814. On verra que plusieurs, acceptés en principe par ce pape, reçurent de tels accueils dans leurs évêchés, quand ils voulurent en prendre possession temporelle, qu’ils ne trouvèrent pas d’évêques pour les sacrer (Mgr Dejean), ou bien ne purent accomplir les devoirs de leur charge. D’autres eurent du mal à se faire pardonner leur origine, et même démissionnèrent à la Restauration. D’autres, au contraire, préférèrent subir la prison et l’exil plutôt que d’obéir aveuglément aux injonctions napoléoniennes (v.g. Mgr de Boulogne). On verra qu’un prêtre, nommé évêque titulaire (il reçut son bref de Léon XIII), ne put se faire sacrer, sous la menace gouvernementale, exhumant un décret non appliqué de 1808, de se voir priver de ses droits de citoyen français (Mgr de Chazelles), et qu’un autre (Mgr d’Humières) ne trouva aucun évêque français pour le sacrer.

Dans les missions : ici, c’est un évêque jésuite (Mgr Flanchet), massacré sans qu’on ait connu le lieu et la date exacte de l’évènement ; là, c’est un zélé missionnaire, Mgr Ravoux, qui, préconisé évêque à 90 ans, refuse pour raison de santé, et à qui Dieu permet encore de porter allègrement ses 90 ans. Ici, c’est le sacre de Mgr Theurel, fait en secret, en pleine persécution, dans une hutte en bambous et la nuit ; là, c’est un martyr, le Bienheureux Dumoulin-Borie, qui ne connut qu’au moment d’entrer au ciel son élévation à l’épiscopat ; ou bien encore ce sont des évêques résidentiels de Babylone, ou administrateurs de Mésopotamie, qui sont consuls de France à Bagdad.

Dans nos lignes sèches on devinera combien fut important le mouvement religieux qui, au siècle dernier, fit refleurir des abbayes bénédictines, où la prière s’unit à la science persévérante. (Hélas ! vont-elles donc rester à l’état de souvenir et de regrets, maintenant que la persécution en a rendu les cloîtres déserts ?) Admirable, oui, fut ce mouvement qui éleva ces Trappes où l’on montre au peuple que travailler, c’est prier ; ces Trappes qui, comme le bon grain, essaiment et fondent des « granges » devenues prieurés puis abbayes, en Palestine, en Chine, aux Etats-Unis, pieuses solitudes où, sous l’égide du drapeau de la mère-patrie, des moines blancs enseignent à ceux qui les entourent à respecter et à aimer le nom de la France.

Quelques lecteurs apprendront, non sans surprise peut-être, que tout le clergé d’Haïti est français, que le séminaire où il se forme est même en France. N’est-ce pas merveilleux d’avoir donné aux Etats-Unis quarante évêques dont plusieurs vivent encore ; prélats n’appartenant à aucune congrégation, mais qu’attiraient dans ce pays si étrange une impulsion mystérieuse, et le besoin si français de se dévouer au bien des âmes ? En un siècle, les Missions-Étrangères