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tendu, comme pour repousser le pasteur, s’écria d’une voix haute et ferme : Au nom de Dieu, Monsieur, ne me parlez pas de cet homme. » Telles furent les dernières paroles de Voltaire[1].

Après avoir fait le récit des principaux incidents qui marquèrent les derniers jours du grand poète, nous allons raconter comment est mort l’éloquent sophiste : J.-J. Rousseau.

Au printemps de 1778, Rousseau s’était installé avec Thérèse dans la magnifique propriété d’Ermenonville, où M. de Girardin lui avait offert un asile. Sa santé était devenue de plus en plus mauvaise, et sa monomanie tout à fait caractérisée. Pour s’en convaincre, il suffirait de lire ses Rêveries d’un promeneur solitaire. Mais le témoignage des personnes qui l’ont visité à Ermenonville est encore plus décisif. Corancez, qui le voyait fréquemment, a laissé des détails intéressants sur ses dernières années. « Depuis longtemps, dit-il, je m’apercevais d’un changement frappant dans son physique ; je le voyais souvent dans un état de convulsion qui rendait son visage méconnaissable, et surtout l’expression de sa figure réellement effrayante[2]. Dans cet état,

  1. On a ignoré quelque temps dans le public, l’heure et le jour de la mort de Voltaire. Tout Paris était encore à sa porte pour demander de ses nouvelles, que son corps avait été enlevé pour être transporté hors de la capitale, à l’abbaye de Sellières, dont son neveu était abbé, sur le refus du curé de Saint-Sulpice de l’enterrer. (Voy. Correspondance littéraire.)
  2. Cette horrible contraction de sa physionomie lui était habituelle. Diderot l’avait déjà remarqué. Dans une dernière réunion où ils se trouvèrent en face, où l’on crut les rapprocher, dit Michelet dans son livre intitulé : Louis XV et Louis XVI,