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ennemis ont toujours pour eux la rosée du ciel, la graisse de la terre, la mitre, le coffre-fort, le glaive et la canaille. Tout ce que nous avons pu faire s’est borné à faire dire dans toute l’Europe, aux honnêtes gens, que nous avons raison, et peut-être à rendre les mœurs un peu plus douces et plus honnêtes..... Ce qu’il y a d’affreux, c’est que les philosophes ne sont point unis et que les persécuteurs le seront toujours. Il y avait deux sages à la Cour (Turgot et Malesherbes), on a trouvé le secret de nous les ôter ; ils n’étaient pas dans leur élément. Le nôtre est la retraite ; il y a vingt-cinq ans que je suis dans cet abri. J’apprends que vous ne vous communiquez dans Paris qu’à des esprits dignes de vous connaître ; c’est le seul moyen d’échapper à la rage des fanatiques et des fripons. Vivez longtemps, monsieur, et puissiez-vous porter des coups mortels au monstre dont je n’ai mordu que les oreilles ! »

Cette lettre, outre qu’elle fait connaître les sentiments de Voltaire sur Turgot et Malesherbes, donne quelques renseignements intéressants sur la façon dont Diderot vivait alors à Paris.

Il partageait sans doute entre la société de d’Holbach et celle de madame d’Épinay le peu de temps qu’il ne passait pas au travail ou chez mademoiselle Voland. Remarquons aussi qu’il y eut alors une espèce de reprise dans les rapports de ces deux hommes célèbres, car, le 8 décembre de la même année. Voltaire écrivait encore au Philosophe : « J’ai quatre-vingt-trois ans et je vous