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au mal dont souffre la France. « Il faut, sire, dit-il au roi, vous armer contre votre bonté de votre bonté même ; considérer d’où vous vient cet argent que vous pouvez distribuer à vos courtisans ; et comparer la misère de ceux auxquels on est quelquefois obligé de l’arracher par les vexations les plus rigoureuses, à la situation des personnes qui ont le plus de titres pour obtenir vos libéralités…

» Aucune réforme n’est possible sans l’économie, parce qu’on doit s’attendre aux embarras multipliés que feront naître les manœuvres et les cris des hommes de toute espèce, intéressés à soutenir les abus : car il n’en est point dont quelqu’un ne vive. J’ai prévu que je serai seul à combattre contre les efforts de ceux qui gagnent à ces abus, contre la foule des préjugés qui s’opposent à toute réforme, et qui sont un moyen si puissant dans la main des gens intéressés à éterniser les désordres. J’aurai à lutter même contre la bonté naturelle, contre la générosité de Votre Majesté et des personnes qui lui sont les plus chères. Je serai craint, haï même, de la plus grande partie de la cour, de tout ce qui sollicite des grâces ; on m’imputera tous les refus ; on me peindra comme un homme dur, parce que j’aurai représenté à Votre Majesté qu’elle ne doit pas enrichir même ceux qu’elle aime, aux dépens de la subsistance de son peuple. Ce peuple, auquel je me serai sacrifié, est si aisé à tromper, que peut-être j’encourrai sa haine par les mesures mêmes que j’emploierai pour le défendre contre les vexations. Je serai calomnié et peut-être avec assez de