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imagination et des ascarides. Je ne cessais de lui dire : « Monsieur le baron, savez-vous ce que vous faites ? Vous cherchez un médecin qui vous tue et vous le trouverez[1]. »

Vers la fin d’août 1773, Diderot partit pour Pétersbourg en compagnie de M. de Nariskin, dans une bonne voiture et à petites journées. Il espérait trouver Grimm en Russie ; mais il apprit avec chagrin que le voyage de son ami était ajourné.

L’Impératrice lui fit l’accueil le plus doux. Tous les jours, il lui était permis d’entrer dans son cabinet, depuis trois heures jusqu’à cinq ou six. « J’entre, écrit-il à Sophie, on me fait asseoir, et je cause avec la même liberté que vous m’accordez ; et, en sortant, je suis forcé d’avouer à moi-même que j’avais l’âme d’un homme esclave dans le pays qu’on appelle des hommes libres, et que je me suis trouvé l’âme d’un homme libre dans le pays qu’on appelle des esclaves. Ah ! mes amis, quelle souveraine ! quelle extraordinaire femme ! On n’accusera pas mon éloge de vénalité, car j’ai mis les bornes les plus étroites à sa munificence..... Sa Majesté impériale et le général Betzky, son ministre, m’ont chargé de l’édition du plan et des statuts des différents établissements que la souveraine a fondés

  1. Dans sa Correspondance, Diderot remarque que les médecins ne font pas attention aux symptômes moraux, dans les maladies. « Je crois, dit-il, qu’ils ont tort. On est bien malade quand on perd son caractère : on se porte mieux quand on le reprend. » (Voy. Lettres à mademoiselle Voland.)