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fut jugée au-dessus du talent de Walpole ; et on l’attribua, les uns à madame du Deffand, d’autres à Hume ou à d’Alembert. Quoi qu’il en soit, elle fut le premier grief de Rousseau contre Hume. On trouve la trace d’un second grief dans une lettre que Jean-Jacques écrit d’Angleterre à la comtesse de Boufflers. Il impute à Hume le désir d’être indiscret. Enfin, un troisième reproche, c’est la froideur du philosophe anglais, quand Rousseau, honteux de ses soupçons, « se jette dans ses bras, l’inonde de larmes et s’écrie : Non ! non ! David n’est pas un traître. » On le voit, tous ces griefs n’avaient pas l’ombre du sens commun. Cependant, le 1er mai 1767, Rousseau, après avoir rompu avec Hume, quittait sa résidence de Wooton, et revenait en France, où le prince de Conti lui avait fait préparer un appartement dans son château de Trie. Nous verrons, par la suite, que ce ne devait pas être là sa dernière résidence.

Dans les premiers temps de la liaison du citoyen de Genève et de Hume, ce dernier écrivait à ses amis de Paris qu’il était très-satisfait de son protégé. « Mon pupille, disait-il, est arrivé en bonne santé ; il est très-aimable, toujours poli, souvent gai, ordinairement sociable ; » et dans une lettre adressée au baron d’Holbach il disait : « Il m’est pénible de penser que vous soyez injuste à son égard. Croyez-moi, Rousseau n’est rien moins qu’un méchant homme. Plus je le vois, plus je l’estime et je l’aime. » En lisant cela à ses amis, le baron ajoutait : « Il ne le connaît pas encore, patience ;