nomie distincte et grave dans la mémoire chaque citoyen de ce petit peuple héroï-comique. Seuls, les compagnons emmenés de Paris par Huon sont restés à l’état de simples comparses, muets et à peu près inutiles.
Mais le principal attrait du poème est peut-être le récit lui-même, l’enchaînement facile et bien suivi des aventures dont il se compose. Il ne faut pas chicaner le poète sur les vraisemblances, lui demander, par exemple, comment il se fait que son voyageur rencontre dans le monde entier des parents ou des amis ; la naïveté même de ce procédé finit par nous amuser, et quand il rencontre, sur un rivage désert, entre les villes, inconnues aux géographes, de Monbranc et d’Aufalerne, un vieux ménestrel, nous sommes presque désappointés en voyant qu’il n’est pas son cousin germain. Une fois qu’on a fait au conteur, sur ce terrain et sur quelques autres, les concessions que ne lui marchandait pas la crédulité de ses contemporains, on reconnaît que son œuvre est bien composée et, du commencement à la fin, soutient, renouvelle et accroît l’intérêt. Les trois parties entre lesquelles elle se distribue naturellement se correspondent bien et se font un heureux équilibre. La première est purement féodale et française ; la seconde nous transporte dans le monde oriental et introduit le merveilleux avec Auberon ; dans la troisième les éléments de chacune des deux premières se fondent pour aboutir à un dé-