VI
L’empereur cependant, dont la tête s’incline,
S’en va, cherchant toujours, de colline en colline.
Il quitte son coursier qui lui semble trop lent.
A toute la contrée il demande Roland ;
Et, comme il n’entend plus les appels de sa corne,
Son angoisse s’accroît de ce silence morne.
Un sommet dans les airs se dressait devant lui :
Il y monte, il se fait de sa lance un appui ;
Et de là, dans le val que la lune regarde,
Il découvre à la fin sa chère arrière-garde.
Froid comme une statue et sans pousser de cris,
Il contemple, ô douleur ! cet immense débris,
Sur qui la lune étend, mystérieuse et claire,
Cette blancheur qui semble un lumineux suaire.
Que de chers compagnons à tout jamais perdus,
Que de preux dorment là, pêle-mêle étendus,
Dont la mort a trompé la dernière espérance,
Et qui ne verront plus le doux pays de France !
Au milieu des hauberts, des casques fracassés,
Ils sont là, sous le ciel, farouches trépassés,
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