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LA VIE RURALE.

Qui jadis faisait dire à nos sages aïeux :
« Heureux les jeunes morts, ceux-là sont chers aux dieux !
Heureux les affranchis du joug et de la peine
Qui laissent en partant la coupe encore pleine ! »
— Que faire ? reprends-tu, quel remède puissant
Opposer aux assauts de cet ennui croissant ?
N’est-ce pas au plus vieux, c’est-à-dire au plus sage,
De prêter sa science à l’autre, en ce passage ?
— Oui, frère, et sans retard à ton aide j’accours.
Je ne te ferai pas un bien savant discours ;
Je dirai seulement, moins pédant qu’un Ariste :
Le remède est aux champs, si le remède existe.
L’ennui que tu ressens, tu sais s’il fut le mien !
À quiconque en est pris la ville ne vaut rien :
Pour l’âme qui, plus mûre, à la fin se replie,
Elle a trop de fracas, de rumeurs, de folie.
Il est triste d’y voir arriver tout un flux
De passants, de voisins que l’on ne connaît plus.
Les premiers sont partis, laissant leurs places vides
À ces nouveaux venus qui se pressent avides.
« Rangez-vous, s’il vous plaît, arrière, bons parents,
Place à vos héritiers ! » disent ces conquérants
Superbes, qui, du droit de leurs blondes moustaches,
S’estiment bons à tout, même aux plus rudes tâches.