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LE PAYSAGE.

Tout cela, ce me semble, est beaucoup de fatigue !
Parle sincèrement ; crois-tu qu’il soit besoin,
Pour faire une moisson, d’aller toujours si loin ?
Tel ne fut point l’avis des rois du paysage :
Ruysdael, sans s’appauvrir en frais de long voyage,
Sans aller seulement de Harlem à Vinkel,
Récoltait cent tableaux d’un éclat immortel.
Toute grandeur n’est pas dans le seul grandiose ;
Winants, qui le savait, et peignait de la prose,
Fidèle à son village, eût donné mille fois
Un pylône sacré pour un moulin bourgeois.
La nature, après tout, reste encor la nature.
Un arbre comme un temple a son architecture ;
Et Nicolas Berghem estimait sagement
Qu’une vache en un pré vaut bien un monument.
Toi-même, moins épris de l’ocre et du cinabre,
Toi-même sus trouver, près de ton cher Soumabre,
Aux endroits où le Rhône étale sa belle eau,
Tel sujet, tel motif d’esquisse ou de tableau
Dont Gautier fit l’éloge en ses Salons du Louvre.
Dieu sait, en quatre pas, tout ce que l’œil découvre !
Tout homme sachant voir peut, dans son horizon,
Faire un voyage immense autour de sa maison.
Assis au banc rustique où s’asseyait son père,