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LES MOINES.

L’homme apporta chez vous l’outrage et la terreur.
Il est vrai que ce jour, de sinistre mémoire,
Fut celui qui frappait le génie et la gloire ;
Il est vrai qu’à cette heure, affranchi de remords,
L’homme ouvrait les tombeaux pour en chasser les morts,
Niait toute grandeur, tout droit, tout rang suprême,
Et jusque sur son trône insultait à Dieu même !

Le chaos entra donc dans ces cloîtres sacrés :
Les vandales nouveaux, de rapine altérés,
Gravissant à l’envi les cimes les plus hautes,
De leurs parvis heureux dispersèrent les hôtes.
Tout fut enveloppé dans l’outrage mortel ;
L’abomination s’empara de l’autel ;
Le vénérable toit s’écroula pierre à pierre ;
Où résonnaient les chœurs, où veillait la prière,
Éclata le blasphème et l’obscène chanson.
La mort ne fit jamais plus complète moisson.
Et quand le voyageur, quand l’homme épris d’études.
Explore désormais ces mornes solitudes.
Soit qu’il entre à Glairvaux, soit qu’il monte à Luxeuil
Sur le désastre immense il pleure dès le seuil.
Ô vaste Mont-Majour ! ô Sénanque ! ô Jumiéges !
J’ai vu, meurtris encor de leurs coups sacrilèges,