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LA VIE RURALE.

Paris, comme autrefois les peuples disaient Rome,
Du pensif Berrichon fascinait les esprits ;
À l’horizon sans cesse il revoyait Paris :
Le jour à son travail, la nuit durant ses veilles,
Un démon lui montrait ce foyer de merveilles,
Cet amoncellement de faciles trésors,
Ce spectacle si riche — à le voir du dehors.
Le ciel du doux pays, à la saison nouvelle,
En vain l’enveloppait de son rayon fidèle ;
Les blés autour de lui poussaient comme autrefois ;
En vain l’eau de la source, en vain l’oiseau des bois,
Et l’aubépine en fleur, l’accrochant par sa veste,
Lui disaient : « Ne pars pas ! reste parmi nous, reste ! »
Il partit, il voulut voir, au bout du chemin,
Son rêve, et le toucher de son avide main.
La cité le reçut, cœur troublé de démence ;
Atome, il se perdit dans cette mer immense ;
Lui si faible et si vain, si pauvre et si petit,
Sans même l’entrevoir, le monstre l’engloutit.
C’est leur histoire, hélas ! leur histoire commune
À tous ces beaux chercheurs de gloire et de fortune,
À tous ces paysans du village évadés,
Qui vont jouer leur vie en quatre coups de dés ;
La ville impitoyable aussitôt s’en empare ;