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LA VIE RURALE.

Alla dedans un clos en amont du torrent.
Là, de ses compagnons Jésus se séparant :
« En cet endroit, fit-il, demeurez en prière. »
Lui, dans un autre endroit, distant d’un jet de pierre,
S’étant mis à genoux, il sentit dès l’abord
Son cœur pressé d’un deuil poignant comme la mort.
« Père ! éloignez de moi, disait-il, ce calice.
» Que votre volonté nonobstant s’accomplisse. »
Lors un ange parut, un bel ange du ciel,
Qui lui dit : « Bon courage ! allons, buvez ce fiel ;
» Monseigneur votre père à regret vous l’ordonne.
» — Ah ! fit notre Sauveur, est-ce qu’il m’abandonne ? »
Et l’ange lui tenait le front, car, blêmissant,
Il tombait et suait une sueur de sang.

» Les heures de l’angoisse et du combat suprême,
Un jour, ô mon Sauveur, sonneront pour moi-même.
En souvenir des maux qu’il vous fallut souffrir,
Assistez-moi, Jésus, et m’aidez à mourir.

» Se relevant ensuite, il chercha ses apôtres.
Dans l’herbe tous dormaient : « Quoi, vous dormez, vous autres !
» Levez-vous et priez, priez à haute voix. »
Comme il parlait ainsi, Judas sortit du bois,