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LE BERGER DE PRADINE.


Lui-même, agenouillé sur le seuil de l’étable,
Presse le pis fécond dans le vase écumant.
Les fromages qu’il fait, blancs et gras, sont vraiment
Dignes de vous, dieux de la table !

Superbe est le bétail élevé par ses soins,
La blonde toison brille et semble enrubannée.
À ce métier, pourtant, il gagne par année
Quarante écus, ni plus ni moins.

On admire, on s’émeut de cette vie étrange,
Il n’a pas en vingt ans trois fois changé d’habits ;
Quelques noix, du fromage, un morceau de pain bis,
Chaque jour, voilà ce qu’il mange.

Durant les mois brûlants, tout le jour au bercail,
Avec ses chers moutons il dort près de la crèche.
Il ne sort que le soir. La nuit sereine et fraîche
Est pour lui le temps du travail.

Alors, sur les coteaux où la lavande abonde,
Au penchant des rochers tout embaumés de thym,
Il mène ses brebis, et là, jusqu’au matin,
Il veille dans la nuit profonde.