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L’ÉPREUVE.

Où le travail du jour ne retient plus personne,
Où les plus mâles cœurs sont heureux du repos.
C’est alors qu’elle seule, esprit toujours dispos,
Âme toujours vaillante au fardeau qu’elle porte,
Un livre dans les mains, s’assied devant sa porte,
Et, tandis que le jour expire au bord des cieux,
Que le soir au vallon s’étend silencieux,
Tandis qu’au bout du pré que la rivière mouille,
S’élève, à temps égaux, le chant de la grenouille,
Elle, des cinq enfants prenant les deux aînés,
Sur le livre longtemps les retient inclinés ;
Car, quel que soit le sort, aime-t-elle à redire,
Il convient avant tout que l’homme sache lire.
Tel est ce brave cœur, cet esprit fier et doux,
Qui partagea dix ans les labeurs de l’époux.
L’avenir lui sera plus sévère et plus rude.
Il sera triste, hélas ! dans cette solitude,
De la voir s’en aller, par le pierreux chemin,
Avec les cinq enfants ramassés sous sa main,
Jusqu’au funèbre enclos voisin du presbytère ;
Puis, le soir, revenue à sa demeure austère,
Quand les chers orphelins seront tous au berceau,
Recommencer la nuit, seule avec son fuseau !