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derniers vers, et, par un tragique effort, retarder le dénoûment de sa vie pour arriver à celui de son drame. Et, chose qui tient du mystère, cette œuvre ainsi créée, ce drame écrit sous les étreintes de la mort, sera précisément celui où se sentira le mieux la palpitation de la vie, ce sera le Lion amoureux, dont les accents feront courir sur la foule un frisson de terreur, de pitié et d’admiration. La passion parle dans cette pièce, l’amour, ce phénomène devenu si rare au théâtre ! Qui ne sentirait les larmes lui monter aux yeux, à ce passage où le républicain Humbert, se croyant trahi par la femme qu’il aime, laisse échapper le cri de son désespoir et de sa détresse !

O Dieu ! moi qui l'aimais comme l'on n'aime pas !
Trop ! mon honneur confus se l’avouait tout bas.
J'ai, de ma conscience étouffant le reproche,
Pour elle supporté l'étonnement de Hoche ;
J'ai vu ceux dont je fus le constant compagnon
Se déshabituer de prononcer mon nom ;
Haines, cultes, travaux, génie, œuvre immortelle,
Tout enfin, tout avait disparu devant elle.
— Qu’est-ce que vous voulez que je fasse à présent ?
Comment ranimerai-je un zèle agonisant ?
Si vous voulez me rendre aux soins de la patrie,
Rendez-moi donc l’ardeur que vous avez tarie,
Rendez-moi mes élans, ma verve, mes courroux,
Et le pouvoir d’aimer autre chose que vous !...


Serait-ce là le cri d'Alceste ? Est-il permis de voir