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Armant avec effort contre les chocs nouveaux
Ce vieux bois, fatigué par tant de durs travaux.
L’un des trois compagnons, vieillard solide et svelte,
Avait l’aspect hautain d’un ancien patron celte ;
L’autre, son fils peut-être, en la vigueur des ans,
Avait l’air d’un lutteur, fier de ses bras luisants.
Le troisième, enfant blond, qu’à l’œuvre on associe,
Offrait les clous, tendait la varlope ou la scie,
Heureux de s’employer en ce commun labeur.
Je les vis tout le jour s’agiter en sueur.
Vers midi seulement, ouvriers sans reproche,
Ils prirent à la hâte un repas sur la roche,
Dîner frugal, de noix et de fromage sec.
La vague cependant, sur l’algue et le varech,
Bondissait, et, du roc venant laver la marge,
Leur chantait sa chanson mélancolique et large.

C’était en un vallon dont le sol raviné
S’ombrage d’un vieux pin sous la bise incliné ;
Du monde primitif inculte paysage,
Ornière entre deux monts creusée, âpre et sauvage,
Qui semble un double mur de pierres sans ciment,
Et sur la vaste mer débouche brusquement.