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poètes dont mes yeux cherchent la place vide, ce n’est pas seulement l’historien, l’orateur, le citoyen, dont je déplore avec vous la perte ; c’est aussi, — pardonnez à l’égoïsme des regrets, — c’est le glorieux patron de ma jeunesse, l’illustre ami de ma vie entière. Pourrais-je ne pas me souvenir que ses encouragements m’ouvrirent la carrière ; que je lui dus, peut-être, de poursuivre des travaux qui reçoivent aujourd’hui la plus haute des récompenses ? Vous comprendrez que j’aie eu à cœur d’honorer cette grande mémoire avant même de rendre hommage à l’éminent écrivain que votre bienveillance m’appelle à remplacer.

Celui-là, messieurs, ne s’est pas endormi plein de jours ; ouvrier laborieux, il était encore à sa tâche, il y était dans toute la brillante maturité de l’âge, dans tout l’éclat d’un talent pur, honnête et vigoureux, quand la mort est venue le surprendre. Elle l’a frappé, on peut le dire, en pleine sève, en pleine gloire ; et telle a été la rude épreuve infligée à ce cœur vaillant, que désormais, quand on prononce le nom de François Ponsard, l’admiration elle-même ne s’éveille qu’après l’attendrissement. Ainsi procède la destinée : habile à composer la tragédie humaine, elle termine par la souffrance ce qu’elle a commencé par la joie et par l’ovation.