Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/314

Cette page n’a pas encore été corrigée

ne pouvait d’ailleurs s’y résoudre, et l’amour de son mari pour l’indépendance les avait seul empêchés d’excéder leur revenu.

Cinq mille livres sterling avaient été placées par contrat sur Mme Bennet et ses enfants, mais comment cette somme devait-elle être partagée entre ceux-ci ? Voilà ce qui dépendait entièrement de la volonté des parents. Ce point, quant à Lydia du moins, devait à cette heure être décidé, et M. Bennet ne pouvait hésiter à accepter les propositions alors sous ses yeux. Dans les termes de la plus douce reconnaissance, quoique brièvement exprimée, il confia au papier son approbation de tout ce qui avait été fait par M. Gardener, et sa promesse solennelle de remplir tous les engagements qu’on pourrait prendre en son nom ; jamais il n’avait espéré que, si même on réussissait à décider Wickham à épouser sa fille, cela se pût faire à des conditions aussi peu onéreuses que celles qu’on lui imposait aujourd’hui ; et ce qui lui plaisait peut-être le mieux dans cet arrangement, c’était le peu d’embarras que tout cela lui donnait, car dès que les premiers transports d’indignation, qui avaient causé tant d’activité dans ses démarches pour retrouver sa fille, furent passés, il retomba naturellement dans son apathie ordinaire ; sa lettre néanmoins fut bientôt expédiée, car quoique lent à entreprendre une affaire, il était prompt dans l’exécution. Il priait son frère de lui laisser connaître plus en détail, les obligations qu’il lui avait, mais il était trop courroucé contre Lydia, pour lui envoyer le plus simple message.

Cette bonne nouvelle se répandit bientôt dans le voisinage, elle y fut reçue avec assez d’indifférence ; si Mlle Lydia Bennet avait été abandonnée sur le pavé de Londres, ou bien encore si ses parents l’eussent envoyée dans quelque ferme éloignée cacher sa honte et la leur, cela aurait fourni, il est vrai, plus de matière à la conversation ; mais enfin son mariage même offrait à la méchanceté force occasions de s’occuper, et les bons souhaits que formèrent pour sa prospérité toutes les charitables voisines de Meryton, ne perdirent que peu de sel à ce changement