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— Peut-être ; mais enfin nous avons agi pour le mieux.

— Le colonel Forster a-t-il pu se rappeler le contenu de la lettre de Lydia à sa femme ?

— Il nous l’a apportée. »

Hélen, la tirant alors de son portefeuille, la donna à Élisabeth, elle était ainsi conçue :

« Ma chère Henriette,

« Vous rirez quand vous saurez où je suis allée, je puis à peine m’empêcher de rire moi-même, en pensant combien vous serez étonnée demain matin, lorsqu’on s’apercevra de mon absence ; je pars pour Gretna-Green [1], et si vous ne pouvez deviner avec qui, j’aurai vraiment une pauvre idée de votre sagacité, car il n’y a qu’un homme dans le monde que j’aime, et cet homme est un ange ; je ne pourrais être heureuse sans lui, aussi je ne crois pas mal agir en le suivant ; il n’est nullement nécessaire de faire part à mes parents de mon départ, si cela vous embarrasse ; leur surprise n’en sera que plus grande, lorsque je leur écrirai et que je signerai Lydia Wickham. Oh ! quelle bonne folie, cette

  1. Hameau sur les frontières de l’Ecosse, où vont se marier ceux qui ne peuvent obtenir le consentement de leurs parents. Autrefois il suffisait, en Écosse, qu’un homme dît, dans une assemblée, à la personne qu’il voulait épouser : « Voulez-vous m’accepter pour époux ? » La femme ayant répondu « oui », leur mariage était valable. Cette loi existe toujours, bien qu’elle ne soit plus consacrée par l’usage. Et voilà pourquoi ceux qui ne peuvent se marier en Angleterre, parce que les formalités nécessaires pour conclure un mariage exigent une publicité qui nuirait à leur projet, s’en vont en Écosse, et, au premier lieu habité, déclarent qu’ils se prennent pour époux. Le hameau le plus voisin de la frontière se nomme Gretna-Green. C’est la demeure, depuis nombre d’années, d’un maréchal-ferrant, qui sert ainsi de témoin à ces mariages.