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chapitre 24


Cette lettre de Mlle Bingley, si vivement attendue, vint enfin détruire tous les doutes : la première phrase donnait l’assurance que toute la famille était fixée à Londres pour l’hiver, et finissait par les regrets du frère, de n’avoir pu, avant son départ, prendre congé de ses amis de Herfordshire.

Tout espoir était perdu et, lorsque Hélen fut en état de lire le reste de la lettre, elle n’y trouva que les expressions amicales de celle qui l’écrivait, qui lui pussent donner quelque plaisir. Les louanges de Mlle Darcy en faisaient le principal sujet : ses charmes étaient célébrés avec emphase, et Caroline se vantait que leur intimité croissait chaque jour, et se hasardait même à prédire l’accomplissement des désirs qu’elle avait manifestés dans sa dernière lettre, disant que son frère demeurait chez M. Darcy. Elle parlait aussi avec enthousiasme d’un nouvel ameublement, dont ce dernier venait de faire emplette.

Élisabeth, à laquelle Hélen vint communiquer cette lettre, la lut avec indignation : son cœur était partagé entre l’inquiétude et le ressentiment. Ce que disait Mlle Bingley de l’inclination qu’avait son frère pour miss Darcy, ne lui fit aucune impression, elle était aussi convaincue que jamais, que c’était Hélen seule qu’il aimait, mais quelque disposée qu’elle fût à bien penser à lui, elle ne pouvait, sans mépris, même sans impatience, réfléchir à cette humeur facile, à ce manque de résolution, qui le rendait, dans cette circonstance, l’humble esclave de ses amis, et lui faisait sacrifier son propre bonheur à leur caprice. Si cependant il ne s’était