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n’auroit pu vous engager à accepter ma main. »

“ Ah ! ne répétez pas, ne répétez pas mes paroles. J’en ai été si honteuse ! „……

Darcy rappela sa lettre, et demanda si Elisabeth avoit ajouté foi à sa justification. “ Je me croyois de sangfroid en l’écrivant ; » continua-t-il, « mais j’ai bien senti depuis qu’elle avoit été dictée par un sentiment amer. „

» Il y avoit en effet un peu d’amertume au début, mais vous finissiez d’une manière toute charitable. Ne pensons plus à cette lettre. Nos sentimens à tous deux sont entièrement changés. Prenez un peu de ma philosophie : je tâche toujours de perdre le souvenir de ce qui n’est pas agréable. „

“ Cela vous est très-facile, à vous qui n’avez jamais de reproches à vous faire ; mais moi j’ai de pénibles souvenirs quoique je fasse. J’étois fils unique et j’ai eu le malheur d’être gâté par le plus excellent père. J’étois devenu un être orgueilleux, personnel. J’avois été élevé à regarder avec dédain tout ce qui n’étoit pas dans mon cercle de famille. J’étois plein de vanité et de sottise, et je serois demeuré tel, si je n’avois été humilié par vous. Il ne m’était pas entré dans l’esprit d’avoir le moindre doute sur l’empressement avec lequel vous accepteriez ma main.