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voyant qu’elle ne savoit pas on mot de français, et ne paroissoit point comprendre le mérite d’un duo de piano qu’elles lui firent la faveur de lui jouer.

Enfin, lasses d’essayer en vain de l’égayer ou d’exciter son admiration, elles lui abandonnèrent généreusement les joujoux dont elle faisoient le moins de cas, et reprirent leurs passe-temps ordinaires.

Fanny ne trouvoit nulle part de quoi remplacer ce qu’elle avoit perdu en quittant sa famille. Le silence de lady Bartram, l’air imposant de son mari, les réprimandes de mistriss Norris augmentoient également sa timidité naturelle. Ses cousines répétoient souvent leurs remarques sur la petitesse de sa taille. Miss Lee, la gouvernante, ne cessoit de s’étonner de son ignorance, les domestiques faisoient des plaisanteries sur ses vêtemens ; enfin, la pauvre enfant, loin de se plaire dans les vastes et somptueux appartemens du château, craignoit toujours de salir ou de gâter les meubles et n’osoit toucher à rien. On se doutoit peu de tout ce qu’elle éprouvoit, mais le soir, quand elle étoit dans son lit, elle se livroit sans contrainte à son chagrin et s’endormoit rarement sans pleurer.

Un jour son cousin Edmond la trouva toute en larmes dans un endroit écarté du jardin.

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