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— C’est que j’étais embarrassée.

— Et moi de même.

— Vous auriez pu causer un peu plus quand vous êtes venu dîner.

— Un homme moins épris en eût été capable sans doute.

— Quel malheur que vous ayez toujours une réponse raisonnable à faire, et que je sois moi-même assez raisonnable pour l’accepter ! Mais je me demande combien de temps vous auriez continué ainsi, et quand vous vous seriez décidé à parler, si je ne vous y avais provoqué ? Mon désir de vous remercier de tout ce que vous avez fait pour Lydia y a certainement beaucoup contribué, trop peut-être : que devient la morale si notre bonheur naît d’une promesse violée ? En conscience, je n’aurais jamais dû aborder ce sujet.

— Ne vous tourmentez pas : la morale n’est pas compromise. Les tentatives injustifiables de lady Catherine pour nous séparer ont eu pour effet de dissiper tous mes doutes. Je ne dois point mon bonheur actuel au désir que vous avez eu de m’exprimer votre gratitude, car le rapport fait par ma tante m’avait donné de l’espoir, et j’étais décidé à tout éclaircir sans plus tarder.

— Lady Catherine nous a été infiniment utile, et c’est de quoi elle devrait être heureuse, elle qui aime tant à rendre service. Aurez-vous jamais le courage de lui annoncer ce qui l’attend ?

— C’est le temps qui me manquerait plutôt que le courage, Elizabeth ; cependant, c’est une chose qu’il faut faire, et si vous voulez bien me donner une feuille de papier, je vais écrire immédiatement.

— Si je n’avais moi-même une lettre à écrire, je pourrais m’asseoir près de vous, et admirer la régularité de votre écriture, comme une autre jeune demoiselle le fit un soir. Mais, moi aussi, j’ai une tante que je ne dois pas négliger plus longtemps.

La longue lettre de Mrs. Gardiner n’avait pas encore