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qu’on sait à partir de ce moment, c’est qu’on les a vus poursuivre leur voyage vers Londres. Je me perds en conjectures. Après avoir fait toutes les enquêtes possibles de ce côté, le colonel Forster a pris la route de Longbourn en les renouvelant à toutes les barrières et toutes les auberges de Barnet et de Hatfield : personne répondant à leur signalement n’avait été remarqué. Il est arrivé à Longbourn en nous témoignant la plus grande sympathie et nous a communiqué ses appréhensions en des termes qui font honneur à ses sentiments. Ni lui, ni sa femme, vraiment, ne méritent aucun reproche.

« Notre désolation est grande, ma chère Lizzy. Mon père et ma mère craignent le pire mais je ne puis croire à tant de perversité de la part de Wickham. Bien des circonstances ont pu leur faire préférer se marier secrètement à Londres plutôt que de suivre leur premier plan ; et même si Wickham avait pu concevoir de tels desseins sur une jeune fille du milieu de Lydia, pouvons-nous supposer qu’elle aurait perdu à ce point le sentiment de son honneur et de sa dignité ? C’est impossible ! J’ai le regret de dire, néanmoins, que le colonel Forster ne semble pas disposé à partager l’optimisme de mes suppositions. Il a secoué la tête lorsque je les ai exprimées devant lui et m’a répondu qu’il craignait qu’on ne pût avoir aucune confiance en Wickham.

« Ma pauvre maman est réellement malade et garde la chambre. Si elle pouvait prendre un peu d’empire sur elle-même ! Mais il n’y faut pas compter. Quant à notre père, de ma vie je ne l’ai vu aussi affecté. La pauvre Kitty s’en veut d’avoir dissimulé cette intrigue, mais peut-on lui reprocher d’avoir gardé pour elle une confidence faite sous le sceau du secret ? Je suis heureuse, ma chère Lizzy, que vous ayez échappé à ces scènes pénibles mais maintenant que le premier choc est reçu, j’avoue qu’il me tarde de vous voir de retour. Je ne suis pas assez égoïste cependant pour vous presser