Peu à peu, cependant, le désappointement causé par son attitude vint modifier cette impression favorable. On s’aperçut bientôt qu’il était fier, qu’il regardait tout le monde de haut et ne daignait pas exprimer la moindre satisfaction. Du coup, toute son immense propriété du Derbyshire ne put empêcher qu’on le déclarât antipathique et tout le contraire de son ami.
Mr. Bingley, lui, avait eu vite fait de se mettre en rapport avec les personnes les plus en vue de l’assemblée. Il se montra ouvert, plein d’entrain, prit part à toutes les danses, déplora de voir le bal se terminer de si bonne heure, et parla d’en donner un lui-même à Netherfield. Des manières si parfaites se recommandent d’elles-mêmes. Quel contraste avec son ami !… Mr. Darcy dansa seulement une fois avec Mrs. Hurst et une fois avec miss Bingley. Il passa le reste du temps à se promener dans la salle, n’adressant la parole qu’aux personnes de son groupe et refusant de se laisser présenter aux autres. Aussi fut-il vite jugé. C’était l’homme le plus désagréable et le plus hautain que la terre eût jamais porté, et l’on espérait bien qu’il ne reparaîtrait à aucune autre réunion.
Parmi les personnes empressées à le condamner se trouvait Mrs. Bennet. L’antipathie générale tournait chez elle en rancune personnelle, Mr. Darcy ayant fait affront à l’une de ses filles. Par suite du nombre restreint des cavaliers, Elizabeth Bennet avait dû rester sur sa chaise l’espace de deux danses, et, pendant un moment, Mr. Darcy s’était tenu debout assez près d’elle pour qu’elle pût entendre les paroles qu’il échangeait avec Mr. Bingley venu pour le presser de se joindre aux danseurs.
— Allons, Darcy, venez danser. Je suis agacé de vous voir vous promener seul. C’est tout à fait ridicule. Faites comme tout le monde et dansez.
— Non, merci ! La danse est pour moi sans charmes à moins que je ne connaisse particulièrement une danseuse. Je n’y prendrais aucun plaisir dans une réu-