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— Mr. Bennet ! À quoi pensez-vous de parler ainsi ? Vous m’aviez promis d’amener votre fille à la raison !

— Ma chère amie, répliqua son mari, veuillez m’accorder deux faveurs : la première, c’est de me permettre en cette affaire le libre usage de mon jugement, et la seconde de me laisser celui de ma bibliothèque. Je serais heureux de m’y retrouver seul le plus tôt possible.

Malgré la défection de son mari, Mrs. Bennet ne se résigna pas tout de suite à s’avouer battue. Elle entreprit Elizabeth à plusieurs reprises, la suppliant et la menaçant tour à tour. Elle essaya aussi de se faire une alliée de Jane, mais, avec toute la douceur possible, celle-ci refusa d’intervenir. Quant à Elizabeth, tantôt avec énergie, tantôt avec gaieté, elle repoussa tous les assauts, changeant de tactique, mais non de détermination.

Mr. Collins pendant ce temps méditait solitairement sur la situation. La haute opinion qu’il avait de lui-même l’empêchait de concevoir les motifs qui avaient poussé sa cousine à le refuser et, bien que blessé dans son amour-propre, il n’éprouvait pas un véritable chagrin. Son attachement pour Elizabeth était un pur effet d’imagination et la pensée qu’elle méritait peut-être les reproches de sa mère éteignait en lui tout sentiment de regret.

Pendant que toute la famille était ainsi dans le désarroi, Charlotte Lucas vint pour passer la journée avec ses amies. Elle fut accueillie dans le hall par Lydia qui se précipita vers elle en chuchotant :

— Je suis contente que vous soyez venue car il se passe ici des choses bien drôles. Devinez ce qui est arrivé ce matin : Mr. Collins a offert sa main à Lizzy, et elle l’a refusée !

Charlotte n’avait pas eu le temps de répondre qu’elles étaient rejointes par Kitty, pressée de lui annoncer la même nouvelle. Enfin, dans la salle à manger,