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en ce moment que si je voulais épouser Louisa, il ne fallait plus vous revoir : je repartis donc aussitôt pour Lyme. Louisa reprenait par degrés le sentiment de son existence ; les médecins répondirent enfin de sa vie, mais non de son rétablissement parfait, ils craignaient qu’elle ne fût très-long-temps faible et souffrante. Qui devait la soigner dans ce cruel état ? Celui qui en était la cause, et à qui peut-être elle avait donné son cœur. Tous nos amis nous croyaient engagés l’un à l’autre ; Harville et sa femme n’en doutaient pas, et leur intérêt pour la pauvre malade en devenait plus vif : j’aurais pu les désabuser ; mais à quoi bon, puisque j’étais décidé à me sacrifier moi-même à mon devoir, comme si j’avais été engagé ? Et jamais, je vous le jure, aucun mot d’amour ni d’union ne m’était échappé ; mais mes assiduités avaient pu le faire supposer. La famille, où j’étais déjà reçu comme un fils, le croyait sans doute, et peut-être Louisa elle-même ; je sentis, pour mon éternel malheur, que je n’étais plus libre de disposer de ma main, et qu’elle devait appartenir à Louisa si la vie lui était rendue. Je réfléchis sur mes torts, et je devais en porter la peine ; je n’avais, certes, pas le droit, pour obtenir mon propre repos, de ris-