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Maria seule n’aimait personne qu’elle, et ne plaisait guère par elle-même ; mais comme elle faisait partie de la famille Musgrove, elle eut sa bonne part des politesses et des attentions des bons Harville ; elle n’avait qu’à s’en louer. Mais, suivant sa coutume, elle avait encore mille sujets de plaintes : George Hayter était venu à Lyme plus souvent qu’elle n’aurait voulu ; elle n’aimait pas dîner chez les Harville, qui n’avaient point de laquais ; on était servi à table par une femme de chambre, ce qui lui était insupportable et lui ôtait absolument l’appétit : ce qui l’avait le plus vexée, c’est qu’on donnait en toute occasion la prééminence à madame Musgrove la mère, qu’on la plaçait au-dessus d’elle à table, oubliant tout-à-fait qu’elle était fille de sir Walter Elliot ; cependant le capitaine Harville lui avait dit une fois qu’elle avait l’air si jeune, qu’elle était si fraîche, qu’il ne pouvait la croire mariée, ce qui l’avait un peu consolée. Elle aimait d’ailleurs passionnément le mouvement et le séjour de Lyme ; elle passait la matinée à courir les rues et les magasins ; il y en avait un de modes où l’on faisait assez bien les chapeaux, témoin celui qu’elle portait, et un libraire qui avait les plus jolis romans du monde.