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aux parens qu’il devait honorer ; j’avais oublié les termes dont il s’était servi, mais je me rappelais confusément ce dont il était question : ceci vous montre l’homme. Remarquez aussi ses protestations d’amitié pour mon mari, et sa reconnaissance, aussi fausse l’une que l’autre : peut-on rien de plus fort contre lui que cette lettre ?

Alice ne voulut pas exprimer à quel point elle était choquée d’entendre de telles expressions contre sir Walter : elle sentait que, si elle donnait l’essor à ce qu’elle éprouvait, elle irait peut-être trop loin ; elle fut obligée de se rappeler que la lecture de cette lettre était une violation des lois de l’honneur ; que personne ne pouvait être jugé par de tels témoignages ; qu’aucune correspondance privée ne devait être mise sous les yeux des autres ; que ce qu’on écrit à un ami est sacré, plus encore peut-être lorsque cet ami n’existe plus, et ne peut motiver une telle indiscrétion : le premier devoir des gens entre les mains desquels tombent des lettres adressées aux personnes que la mort a frappées est de les anéantir : qui oserait, sans cette loi suprême de la conscience et de la délicatesse, confier à un ami ses pensées les plus secrètes ? Ces réflexions la calmèrent un peu : elle