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tel que celui que vous venez de dépeindre, et que ce fût M. Elliot ? Non, c’est impossible, vous êtes dans l’erreur.

— Plût au ciel, répondit madame Smith, que ce fût une erreur ! mais j’ai trop appris à le connaître ! Mes expressions, trop fortes peut-être, vous ont effrayée ; on peut pardonner quelque chose à la colère d’une femme qu’il a plongée dans la détresse ; mais je veux essayer de me calmer, et de m’oublier moi-même ; je veux seulement vous dire sur quoi je l’ai jugé : les faits parleront. Hélas ! pendant long-temps j’aurais, comme vous, repoussé toute idée contraire à l’estime, à l’amitié que j’avais pour lui ; jamais personne n’a mieux su cacher le vice sous des dehors séduisans. Il était l’ami intime de mon mari, qui se fiait entièrement à lui, l’aimait tendrement, et le croyait aussi bon, aussi honnête homme que lui. Il me le présenta, lors de mon mariage, comme l’être qu’il aimait le mieux après moi ; je chérissais trop mon cher Smith pour ne pas partager ses sentimens, et son ami devint aussi le mien, d’autant plus que je le trouvais agréable, gai, complaisant. À dix-neuf ans, on ne réfléchit pas beaucoup : M. Elliot me paraissait aussi loyal, aussi franc que les autres hommes, et beau-