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présence constante à Hartfield d’une personne qu’il aimait beaucoup.

Pauvre homme ! Ce fut un coup terrible pour lui et il fit tous ses efforts pour dissuader sa fille de ce projet.

— Ne disiez-vous pas toujours que vous ne vouliez pas vous marier, renoncer à votre indépendance ?

Emma l’embrassait et souriait ; elle parla longtemps : « Il ne fallait pas la mettre au même rang qu’Isabelle et Mme Weston : le mariage de ces dernières, en les enlevant de Hartfield, avait en effet causé un grand vide, mais elle au contraire ne quitterait pas la maison ; elle continuerait d’y habiter. Il serait beaucoup plus heureux d’avoir M. Knightley toujours à sa portée : est-ce qu’il n’aimait pas beaucoup M. Knightley ? Il ne pouvait le nier. Il pourrait le consulter sur ses affaires à tout instant ; il le trouverait toujours disposé à lui rendre service, à écrire ses lettres et à l’aider de toute façon ».

M. Woodhouse reconnut la justesse de ces remarques. « M. Knightley ne pouvait pas être là trop souvent ; il serait très heureux de le voir chaque jour ; mais n’en était-il pas ainsi actuellement. Pourquoi ne pas continuer à vivre comme par le passé ? »

Bien entendu, Emma ne pouvait espérer persuader son père en une conversation ; néanmoins, l’idée lui avait été suggérée, le temps et la continuelle répétition ferait le reste. Aux prières et aux assurances d’Emma succédèrent celles de M. Knightley : celui-ci fit l’éloge d’Emma avec tant d’affection que M. Woodhouse en fut touché. Ils reçurent le jour même tout l’appui possible du côté d’Isabelle qui manifesta dans sa lettre une approbation illimitée. Mme Weston, le lendemain, aborda le sujet de la façon la plus habile : elle parla du mariage comme d’une affaire arrangée et en même temps comme d’une combinaison des plus heureuses.