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FEUILLETON DU JOURNAL DES DÉBATS

du 28 juillet 1910 [39]




EMMA


Par Jane Austen


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Traduction de M. PIERRE DE PULIGA


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Peu de jours après, M. et Mme Elton vinrent à Hartfield et Emma fut à même de se former une opinion ; elle était seule avec son père ; M. Elton entretint M. Woodhouse et elle put se consacrer à la jeune mariée : un quart d’heure de conversation suffit à la convaincre que Mme Elton était une femme vaine, contente d’elle-même, pleine de prétentions ; ses manières avaient été formées à mauvaise école ; elle était impertinente et familière ; elle ne paraissait pas sotte mais Emma la soupçonna de ne pas être particulièrement instruite.

Mme Elton commenta aussitôt par faire part à Emma de la bonne impression que lui produisait Hartfield.

— Cette maison me rappelle tout à fait Maple Grove, dit-elle, la propriété de mon beau-frère, M. Suckling. Cette pièce est précisément de la grandeur et de la forme de celle où ma sœur se tient le plus volontiers.

Elle en appela à M. Elton.

— La ressemblance n’est-elle pas frappante ? Et l’escalier ? Quand je suis entrée, je n’ai pu m’empêcher de pousser une exclamation. J’ai, je dois l’avouer, une grande prédilection pour Maple Grove, que je considère comme mon véritable « home ». Si jamais, Mademoiselle Woodhouse, vous êtes transplantée comme je le suis, vous comprendrez combien il est délicieux de rencontrer sur son chemin un décor familier.

Emma fit une réponse aussi évasive que possible, mais Mme Elton s’en contenta et reprit :

— Le parc, également, est tout à fait dans le même style : il y a à Maple Grove des lauriers en



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