Page:Austen - Emma.djvu/167

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ronne,

le principal du pays, où il y avait une paire de postiers pour le service des relais. Frank Churchill observa qu’une partie de bâtiment semblait avoir été ajoutée après coup et Mme Weston lui fit l’historique de cette annexe construite une vingtaine d’années auparavant : c’était une salle de bal, mais depuis longtemps il n’était plus question de fêtes et le local était utilisé certains jours de la semaine par le club de whist de Highbury. L’intérêt de Frank Churchill fut immédiatement éveillé et il s’arrêta assez longtemps devant une grande fenêtre à coulisse, pour regarder à l’intérieur de la pièce ; il exprima son regret que l’affectation de la salle fut tombée en désuétude ; il n’y voyait pas de défauts : « Non, elle était assez longue, assez large et suffisamment élégante ; on devrait y danser au moins tous les quinze jours pendant l’hiver. Pourquoi Mlle Woodhouse ne faisait-elle pas renaître l’ancienne coutume ? Elle qui était toute puissante à Highbury ! On eut beau lui dire qu’il n’y avait pas dans le pays de familles susceptibles de fournir un contingent suffisant de danseurs, il ne se laissa pas persuader. Même quand les détails lui furent donnés il ne voulut pas admettre les inconvénients du mélange des différents milieux sociaux : dès le lendemain matin, assurait-il, chacun reprendrait sa place. Emma fut assez surprise de constater que les tendances des Weston prévalaient aussi complètement sur les habitudes des Churchill. Le jeune homme paraissait avoir toute l’animation, les sentiments enjoués et les goûts mondains de son père sans rien de l’orgueil et de la réserve d’Enscombe.

Finalement ils continuèrent leur route et, en passant devant la maison des Bates, Emma se rappela la visite qu’il avait projetée la veille et lui demanda s’il l’avait faite.

— Oui, oui, reprit-il, j’allais justement y faire allusion. J’ai vu les trois dames et je vous suis reconnaissant de l’avertissement préalable que vous m’avez donné. Si j’avais été pris absolument au dépourvu par le bavardage de la tante, je ne sais ce qui serait advenu de moi ! Je fus simplement amené à faire une visite d’une longueur excessive ; dix minutes suffisaient, je