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FEUILLETON DU JOURNAL DES DÉBATS

du 5 juillet 1910 [21]




EMMA


par Jane Austen


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Traduction de M. PIERRE DE PULIGA


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XVIII


M. Frank Churchill n’apparut pas. Peu de temps avant la date fixée il écrivit pour s’excuser : « Pour le moment, il ne lui était pas possible de se rendre libre, à son très grand regret ; cependant, il n’abandonnait pas l’espoir d’être en mesure de faire une visite à Randalls avant peu. »

Mme Weston fut extrêmement désappointée, beaucoup plus en fait que son mari dont elle n’avait jamais pourtant partagé l’optimisme ; M Weston, en effet, demeura surpris et attristé pendant une demi-heure, mais il eut vite fait d’oublier ce déboire et de renaître à l’espérance ; déjà il se rendait compte des avantages du retard apporté à la visite de son fils qui se trouverait avoir lieu sans doute deux ou trois mois plus tard, c’est-à-dire par la belle saison ; de plus, il ne doutait pas qu’à ce moment il ne fût possible à Frank de rester avec eux beaucoup plus longtemps. Ces pensées lui rendirent sa bonne humeur, tandis que Mme Weston après s’être tourmentée à l’avance au sujet du désappointement qu’elle prévoyait pour son mari, avait maintenant perdu toute confiance dans une visite reportée à une époque indéterminée.

Emma ne se trouvait pas dans un état d’esprit qui lui permît de s’inquiéter beaucoup de l’absence de M. Frank Churchill, excepté relativement à Randalls. Cette connaissance à présent n’avait pas de charme pour elle ; elle préférait être tranquille et à l’abri de toute tentation ; mais comme il était désirable qu’elle



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